Les trois délibérations sur lesquelles intervient Cédric Van Styvendael, dont le texte est à retrouver ci-dessous, visent à instaurer une taxe d’aménagement majorée dans trois quartiers de Lyon et Villeurbanne : Gerland, Petite Guille, Buers et sud de la Doua. Cette taxe offrira une meilleure visibilité à tous les acteurs impliqués quant à leurs projets et offrira des ressources supplémentaires aux communes pour construire les équipements publics nécessaires.
Seul le prononcé fait foi
Monsieur le président, chers collègues,
Les trois délibérations sur lesquelles nous sommes invités à nous prononcer visent à instaurer, à partir du 1er janvier 2023, un taux majoré pour la part intercommunale de la taxe d’aménagement (TAi), dans trois secteurs de la métropole.
Deux de ces trois délibérations concernent Lyon, et plus précisément les secteurs de Gerland dans le 7ème, de la Petite Guille dans le 8ème et la troisième porte sur Villeurbanne, en l’occurrence le quartier Buers-Croix Luizet et une partie de Flachet.
Ces périmètres ont été sélectionnés en raison de leur très forte centralité au sein de la métropole et de l’importance des constructions nouvelles à édifier. Un fort développement urbain y est encore rendu possible par le PLU-H et par l’existence de nouvelles disponibilités foncières.
Or, ces constructions entraineront mécaniquement des travaux substantiels de voirie ou de réseaux, ainsi que la création d’équipements publics.
La taxe d’aménagement en vigueur, fixée à 4,5%, est très insuffisante au regard des montants à financer, tant pour la commune que pour la métropole.
La majoration de la taxe d’aménagement, qui atteindra désormais le taux maximal de 20%, permettra de mettre en adéquation l’ambition des programmes immobiliers et la nécessité de financer ces travaux et équipements.
Ainsi, dans le même temps, nous permettons aux entreprises du secteur de réaliser leurs projets, nous construisons de nouveaux logements et nous répondons aux besoins des futurs habitants et usagers des quartiers concernés.
Ces périmètres ont également été sélectionnés en raison du volontarisme politique dont la Métropole, le maire de Lyon et moi-même, excusez la double-casquette que je revêts aujourd’hui, avons fait preuve.
En effet, nous ne sommes pas les deux seules communes à rencontrer ce cas de figure, à savoir de compter sur notre territoire des secteurs avec un fort potentiel de développement urbain.
Mais d’aucuns estiment que cette majoration est une erreur. Elle conduirait soit les promoteurs à renoncer à construire, soit les ménages à renoncer à se loger. Ils s’érigent donc tour à tour en défenseur de la libre entreprise ou en Robin des bois des classes populaires.
Pire, nous serions en proie à une terrible contradiction : appeler à la baisse des coûts du foncier d’une part, instaurer la TAM de l’autre. Notre exécutif serait en pleine schizophrénie.
Alors dans le temps qui est imparti à notre groupe, je voudrais essayer de nous extraire de ce raccourci, de cette impasse. En effet, les choix politiques, malgré ce que certains s’évertuent à insinuer, sont faits de nuances.
Tout d’abord, nous tenons à rappeler que la participation des acteurs privés aux dépenses liées au service public est déjà la règle, nous ne le découvrons pas. Dans les zones d’aménagement concerté (ZAC), dans les projets urbains partenariaux (PUP), chacun des contrats passés prévoit un régime de participations spécifiques de l’aménageur ou du promoteur à ces dépenses. La TA vise le même objectif, mais dans le diffus. L’outil change mais la philosophie reste la même. La TA présente en outre l’avantage d’arriver avant la négociation foncière, la visibilité pour les acteurs privés en est renforcée.
Je veux également revenir sur la menace selon laquelle les promoteurs arrêteraient de construire. Cet argument est parfaitement réversible !
Sans la TAM, les maires arrêteront de signer des permis de construire ! Quel maire acceptera demain de signer pour des milliers de nouveaux logements alors même qu’il sera en incapacité de créer les crèches, les écoles, les parcs, qui permettront à ses administrés de vivre en ville ?
La densité en ville, nous sommes convaincus que c’est incontournable — mieux ! — que c’est souhaitable. Mais pour être acceptée, pour que la ville reste désirée, elle doit s’accompagner de toutes les commodités.
De la même manière d’ailleurs, quels ménages accepteront de s’installer dans nos centres urbains s’ils ne peuvent y scolariser leurs enfants, s’y déplacer, y réaliser leurs formalités administratives, s’y divertir, y faire du sport, s’y aérer ?
Arrêtons de nous dresser les uns contre les autres alors que nous sommes tous parfaitement conscients que tout se tient, que chaque brique participe d’un même édifice qu’il nous appartient d’ériger ensemble.
Les ménages ne pourront plus se loger car les logements sortiront trop cher ! À ceux-là je réponds que notre objectif est évidemment que l’impact de la TAM ne porte pas sur les prix de sortie mais au contraire sur les charges foncières. Sur un point, nous pouvons rejoindre les pourfendeurs de la TAM : si elle devait être répercutée sur les ménages, alors ceux-ci ne pourraient plus suivre.
C’est bien donc de l’autre côté du spectre qu’il faut regarder. Face au peu d’offres foncières, les acquéreurs entrent dans une course folle au plus offrant. Comment freiner cette envolée ? C’est l’éternelle question. La TAM n’est pas l’alpha et l’oméga mais elle peut être un élément de négociation. En imposant de partager cette fiscalité avec le vendeur, elle peut contribuer, à minima, à enrayer cette hausse.
Enfin, et je m’en arrêterai là, arrêtons de crier au loup. La TAM est instaurée pour la première fois dans la Métropole certes mais nous ne sommes pas les premiers à la pratiquer : Lille (12%), Rennes (20%), mais aussi Toulouse (16%) — dont la couleur politique, ça ne vous aura pas échappé n’est pas tout à fait la nôtre (et plusieurs communes de droite en IDF : Le Blanc Mesnil, Antony, Rueil Malmaison) — ont, elles aussi, instauré la TAM. À ma connaissance, les promoteurs n’ont pas pour autant déserté ces grandes métropoles.
Au-delà, cessons cette opposition systématique à tout ce qui pourrait servir à réguler ce marché. Le logement n’est pas un bien comme les autres. Je ne cesserai de le marteler.
En 2000, la loi SRU et l’instauration d’un taux minimum de logements sociaux était une catastrophe qui allait mettre un coup d’arrêt à la construction, ses objectifs étaient irréalistes, inatteignables.
En 2014, la loi ALUR et l’encadrement a dû résister aux mêmes Cassandre pour qui le pire, quand il s’agit de réguler, est toujours certain.
Cessons ces caricatures.
Le groupe socialiste votera pour l’instauration de la TAM à Lyon et Villeurbanne.
Je vous remercie.