Hélène Geoffroy sur la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté

Hélène Geoffroy sur la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté

Le Conseil de la Métropole a approuvé en 2019 la convention pluriannuelle d’appui à la lutte contre la pauvreté avec l’État. Cette convention, en raison de la crise sanitaire, a été prolongée jusqu’en 2023. Cette délibération vient déterminer les orientations de la stratégie pauvreté pour les années 2022-2023, le plan d’actions et le budget correspondant. Hélène Geoffroy est intervenue pour le groupe.

Seul le prononcé fait foi


Madame la présidente, chers collègues,

Je pense qu’on sera assez largement d’accord sur le fait que le sujet dont on parle aujourd’hui devrait pouvoir nous rassembler. Avec cette stratégie nationale de lutte contre la grande pauvreté, nous nous attaquons à une question qui devient urgente.

Il faut plusieurs générations pour sortir de la pauvreté : c’est la promesse du XXème siècle qui n’a pas été tenue. Celle que nos enfants ou nos petits-enfants vivraient mieux que nous. Aujourd’hui, nous voyons s’installer dans la précarité et même dans la grande précarité des pères, des mères, leurs enfants et petits-enfants, sans perspective réelle de sortie d’une crise qui semble permanente. À tel point que nous avons le sentiment dans notre pays que nous aurions parfois quasiment des mondes parallèles, qu’il faut absolument faire de nouveau se rencontrer.

Il me semble que dans le travail qui nous attend, chers collèges, l’État, la Métropole, les collectivités territoriales dans lesquelles nous siégeons pour nombre d’entre nous, mais aussi les associations et le monde économique doivent pouvoir se retrouver dans cette grande cause.

C’est une urgence qui va être encore plus prégnante dans les mois qui viennent. Marie-Christine Burricand parlait de la crise énergétique qui nous attend. Cette crise est là effectivement, et nous le voyons à travers nos associations de solidarité, dont les publics n’ont jamais été aussi nombreux, y compris cet été. Là où en général, il y a une pause, ce n’était pas le cas cet été – et ce n’était pas le cas non plus pendant la crise du COVID.

Ce qui est aujourd’hui frappant, c’est que depuis trois ans nous enchaînons les fragilisations de la société et d’une partie des habitants de notre pays. 

Il va falloir nous interroger sur les choix que nous voulons faire sur les notions de solidarité. Ce que porte ce plan dans lequel s’inscrit la Métropole est simple : c’est donner les moyens d’aller vers ceux qui ne viennent plus vers les institutions, leur donner envie de s’inscrire dans ce que nous portons de façon institutionnelle.

Parce que le danger qui existe aujourd’hui, c’est que nous entrions dans un modèle d’accompagnement de la pauvreté qui ne soit qu’un modèle caritatif et qui ne soit plus le modèle que nous avons voulu à la fin du XIXème siècle et au XXème siècle : un modèle avec des lois qui permettent de donner des droits et des devoirs, mais des droits et des devoirs à l’ensemble des habitants de notre pays ; et que nous soyons obligés de nous appuyer uniquement sur un système caritatif pour aller toucher les habitants les plus éloignés de la pauvreté.

Et donc c’est la question initiale que je posais, le sujet auquel nous allons être tous confrontés quelles que soient nos opinions : voulons-nous avoir un accompagnement et une solidarité qui permettent de s’émanciper et de trouver du travail ? Parce que je pense moi aussi que le travail permet de se réaliser : malgré son origine étymologique, il permet s‘il se fait dans de bonnes conditions, et c’est ce que nos lois permettent et doivent permettre encore plus, de trouver des conditions d’épanouissement.

Sur ce que nous avons aussi porté dans ce plan, c’est la capacité de donner de la voix aux citoyens concernés. Il ne s’agit pas simplement de dire que nous accompagnons, que nous aidons. Il faut qu’ils puissent être partie prenante des choix qui sont faits, et je salue le travail des associations engagées sur un champ excessivement compliqué. Parce qu’il est difficile quand on est dans la grande pauvreté de prendre le temps de réfléchir aux solutions à apporter à sa situation. Et malgré tout il faut le faire si nous voulons reconnecter les différentes composantes de notre société.

Les mois qui viennent vont être terribles pour la cohésion de notre société et de nos villes, parce que pour la première fois depuis longtemps nos collectivités locales vont être impactées très fortement. Il faut qu’elles puissent aussi jouer leur rôle d’amortisseur social qu’elles ont souvent joué, et nous ne savons pas si elles seront en capacité de le faire.

C’est l’autre sujet à mon avis qui doit unir l’ensemble des élus de cette assemblée : une capacité à porter au niveau national une voix qui explique que sans les collectivités locales, la Métropole et les villes, c’est le tissu social qui peut se fragmenter encore plus, au moment où la crise n’est pas seulement annoncée mais qu’elle est déjà là.

Je vous remercie chers collègues pour votre attention, et je dis évidemment que notre groupe votera cette délibération.